Voyage au pays des steppes

Arrivée à Ulaan Bator. Ouverture du Naadam

Arrivée à Ulaan Bator

Après un long trajet via Berlin puis Moscou, nous arrivons en début de matinée à Ulaan Bator, capitale de la Mongolie. Nous sommes accueillis à l’aéroport par Cathy, notre accompagnatrice française de Terre d’Aventures. Deux personnes ayant annulé leur voyage après avoir raté leur correspondance à Paris, nous serons finalement sept personnes : Aude, Christine, Françoise, Michaela, Patrick, Sylvie, et moi-même. Nous faisons la connaissance de Tounga, qui sera le chauffeur du minibus pendant deux semaines, et d’Eruna, notre interprète. Le bus nous dépose tout d’abord au Peace Bridge Hotel afin que nous puissions poser nos bagages et prendre une douche, très appréciable après plus de vingt-quatre heures passées dans les avions et les aéroports.

En chemin, j’ai pu avoir un premier aperçu d’Ulaan Bator : l’ancienne Urga, qui n’était dans les années 1930 qu’une ville de yourtes, est devenue pendant les années 1960 une ville à l’architecture stalinienne : les immeubles sont ternes et massifs ; les énormes tuyaux qui s’échappent des stations thermiques ne sont pas enterrés (à cause du gel pendant le rigoureux hiver mongol) et défigurent le paysage. Quelques chevaux paissent au pied d’une énorme cheminée dégageant une épaisse fumée (la ville est polluée, et l’on croise souvent des habitants portant un filtre protecteur sur le visage). Une partie de la population de la capitale vit dans des quartiers de yourtes et de baraques en bois qui tiennent plus du bidonville. On trouve aussi des immeubles neufs, mais accessibles aux plus aisés, et des tours de verre modernes abritant des banques. Mais, d’une manière générale, Ulaan Bator n’est pas une ville très déconcertante.

Avec plus de 600 000 habitants, Ulaan Bator regroupe le quart de la population mongole (2,4 millions de personnes, pour un territoire grand trois fois comme la France), et n’est visiblement pas adaptée à une telle population. Durant la période communiste, le gouvernement avait incité les nomades à se sédentariser. Aujourd’hui [juillet 2000], un tiers de la population est citadine, mais il n’y a qu’une demi-douzaine de grandes villes dans tout le pays. Les capitales des aïmaks (la Mongolie est divisée en 18 aïmaks) et des sums (subdivisions des aïmaks) ne sont le plus souvent que de tout petits villages. Sous la pression de la crise économique qui sévit depuis le passage progressif à l’économie de marché, il y a même une incitation au retour à la vie nomade d’éleveur, jusqu’à présent sans guère de succès.

Cérémonie d’ouverture du Naadam

Nous sommes le 11 juillet, premier jour du Naadam. D’une manière générale, un naadam est une fête (c’est d’ailleurs la signification du mot) comportant courses de chevaux, tir à l’arc et lutte mongole. Trois sports qui symbolisent le mode de vie traditionnel des Mongols et l’Histoire du pays, marquée par les guerres et les conquêtes. Des naadams peuvent avoir lieu un peu partout et à différentes époques de l’année, par exemple lors d’une fête nationale, d’un mariage, voire d’élections (comme ce fut le cas pour les élections législatives qui ont eu lieu quelques semaines auparavant ). Mais les 11 et 12 juillet sont les jours de la fête nationale, et à Ulaan Bator a lieu le naadam le plus important du pays et de l’année : c’est celui qui rassemble le plus grand nombre de cavaliers et de tireurs, et les meilleurs lutteurs. Les candidats viennent de tout le pays, partant parfois une semaine à l’avance. A la périphérie d’Ulaan Bator, un énorme campement leur est réservé, où ils s’installent avec leurs chevaux et leurs yourtes.

Nous nous rendons au stade de la ville où doit se dérouler la cérémonie d’ouverture, à dix heures. C’est aussi dans ce stade qu’ont lieu les épreuves de lutte et les remises des prix. Le tir à l’arc, quant à lui, se déroule en dehors du stade, pas très loin, et les courses de chevaux dans la steppe, à quelques kilomètres de la ville. Sous une chaleur accablante, nous faisons la queue devant une entrée réservée aux touristes étrangers.

A l’intérieur, le stade est comble : le Naadam est une fête nationale très suivie par les Mongols, relayée par la presse, la radio et la télévision. Les ombrelles se déploient dans les gradins situés en plein soleil. Face à nous, à l’autre extrémité du stade, figurent sur de grands panneaux le soyembo, emblème de la Mongolie, et une représentation de l’oiseau Garouda (rapace présentant des attributs humains. Il s’agit d’une créature de la mythologie indienne adoptée par le bouddhisme). Ce qui n’empêche pas le pourtour du stade d’arborer des panneaux publicitaires un peu plus profanes...

Le soyembo

Le soyembo est un emblème complexe et riche de symbolique. C’est la première lettre d’un alphabet créé au 17ème siècle. Il est surmonté d’une langue de feu à trois pointes qui représente le passé, le présent et l’avenir de la nation, la perpétuation et la prospérité de la famille. En dessous, le cercle et un croissant sont le soleil-mère et la lune-père. Les deux triangles pointant vers le bas représentent deux flèches, symbolisant la victoire sur les ennemis, la volonté de liberté et d’indépendance de la nation. Les deux rectangles représentent la droiture, l’honnêteté (il y en a deux, ce qui peut être interprété par le fait que dirigeants et dirigés doivent faire preuve de ces qualités). Au centre, deux symboles entrelacés pour l’unité des éléments naturels : feu et eau, terre et ciel, homme et femme. On peut aussi les voir comme deux poissons symbolisant la vigilance (les poissons ne ferment jamais les yeux). L’ensemble est encadré par deux rectangles verticaux qui représentent l’unité de la nation et l’amitié.

On trouve le soyembo un peu partout, sur des bâtiments, des billets de banque, le drapeau national. Du temps des communistes, il était surmonté de l’étoile à cinq branches. On peut souvent voir une partie seulement du soyembo (le feu, le soleil et la lune), sur des temples, des stèles, etc.

La cérémonie d’ouverture du Naadam débute sous l’œil vigilant de quelques milans qui survolent le stade. Les archers de tous âges (les plus jeunes ont six ou sept ans), vêtus du del (costume traditionnel mongol dont il sera question plus loin) défilent, l’arc à la main, et s’alignent en deux rangs de part et d’autre du stade. Deux jeunes garçons vêtus d’un uniforme de guerre de l’époque gengis-khanide viennent prendre place devant deux grands tambours. C’est au tour de la fanfare, en uniforme bleu et rouge (je n’ai pas pu apprendre l’origine de ce costume) d’avancer. Au fond, les lutteurs s’alignent.

Vingt-huit cavaliers font leur entrée et font au pas le tour du stade. Les neuf premiers, montés sur des chevaux blancs, portent chacun un étendard : au sommet d’une perche d’environ deux mètres de hauteur sont disposés en cercle neuf queues blanches dont le crin provient de queues de chevaux ; le tout est surmonté d’un trident couleur or et argent. Cet étendard est d’origine très ancienne, antérieure à l’époque de Gengis Khan ; il était noir en temps de guerre, blanc en temps de paix.

« Quand il eut ainsi aligné la nation aux parois de feutre [les tribus de nomades], en l’année du Tigre, on s’assembla aux sources de l’Onan. On dressa l’étendard blanc à neuf queues, et là, on donna à l’Empereur Cinggis [Gengis Khan] le titre de roi. » (Histoire secrète des Mongols)

Ce chiffre neuf est symbole de multitude, de grand nombre. L’étendard à neuf queues des empereurs symbolisait leur pouvoir sur une multitude de peuples. L’histoire secrète des Mongols parle aussi du « peuple aux neuf langues »

Egalement, en raison de tes services, qu’on ne t’incrimine pas jusqu’à neuf crimes, décréta-t-il. (Histoire secrète des Mongols)

« Lors de l’entrevue, quand il se présenta avec en tête des bouddhas dorés, puis des plats d’or et d’argent, neuf de chaque, des garçons et des filles, neuf de chaque, des hongres et des chameaux, neuf de chaque, et toutes sortes de choses assorties par neuf, il le laissa se présenter devant une portière close. » (Histoire secrète des Mongols)

Les cavaliers défilent au rythme des tambours tandis que la fanfare joue une musique solennelle qui ne déparerait pas dans un péplum. Les cavaliers mettent pied à terre, et les neuf premiers disposent les étendards sur un podium circulaire. Puis ils remontent en selle et disparaissent au trot. Durant tout le Naadam, quatre soldats, relevés régulièrement, se tiendront autour du podium, majestueusement immobiles dans leur uniforme, tête droite, main posée sur le cimeterre à leur ceinture.

Le Président de la République, Bagabandi, vêtu du del, fait un discours. Par la suite, une dizaine de parachutistes atterriront les uns après les autres sur le stade. Après le discours, une dizaine de musiciens prennent place avec leur vielle-cheval (moriin khuur), une vielle mongole dont le chevillier est surmonté d’une tête de cheval sculptée. Plusieurs danses sont exécutées. Les danseuses portent dans leurs bras un khata, une pièce de tissu bleu omniprésente dans la vie spirituelle mongole, et dont il sera question plus loin, ou bien tiennent une courte fourche et portent un panier sur le dos : ce sont les deux instruments servant au ramassage de l’argol, c’est à dire la bouse séchée que les Mongols utilisent abondamment comme combustible (la steppe étant peu prodigue en combustible végétal). Ces danses sont suivies d’une chorégraphie moins traditionnelle : au son d’une musique plus ou moins techno, de jeunes garçons en del ou ancien uniforme de guerre exécutent une chorégraphie dynamique qui évoque volontier la break dance.

Pour terminer la cérémonie, tous les lutteurs viennent s’incliner devant le podium et les neuf étendards, puis ils en font lentement le tour. Les archers font de même. Puis les lutteurs exécutent la « danse de Garouda » : ils avancent lourdement sur le sol, leurs bras imitant le battement d’ailes d’un oiseau. Les combats peuvent commencer.

Lutte mongole

La lutte mongole est le sport populaire par exemple, un peu ce que le football peut être en Europe, sinon plus : les grands lutteurs sont célèbres, figurent sur des posters, des calendriers, des jeux de cartes ; les vainqueurs font la une des journaux, les Mongols font des paris sur les combats. Si les récompenses pour les cavaliers et pour les tireurs à l’arc sont assez modestes, celles des lutteurs sont plus conséquentes (1,5 millions de tugruts pour le premier, 1 million pour le deuxième. [En 2000, 1000 T valaient à peu près 1 $ US]). Les règles sont simples : la lutte se pratique à deux ; pour gagner, il faut faire toucher terre à l’adversaire autrement que par les pieds et les mains ; les coups sont interdits. Bien que, par la simplicité de ses règles, ce sport fasse penser de prime abord au sumo, il faut plutôt le rapprocher du judo (que certains lutteurs pratiquent par ailleurs). Contrairement au tir et à la course, la lutte est un sport strictement masculin et n’oppose que des adultes.

512 lutteurs, soit neuf tours de combats (encore ce nombre faste), s’affrontent au Naadam. Parmi eux figurent les meilleurs. Le costume des lutteurs est soit bleu, soit rouge. Il est constitué d’une sorte de veste, d’une culotte et de bottes. La veste couvre le haut du dos, les épaules, les bras (pas la poitrine, afin de prouver que les concurrents sont bien des hommes), et se noue sur le ventre. Elle sert pour l’adversaire à assurer sa prise.

Plusieurs combats ont lieu en même temps sur la pelouse du stade. Les adversaires s’empoignent, s’observent, immobiles ; ils se testent, s’agacent l’un l’autre, puis tout se précipite et l’un des lutteurs se retrouve à terre. Les premiers combats sont très courts, parfois quelques secondes seulement car les champions terrassent rapidement les lutteurs de moins bon niveau. Ils deviendront plus intéressants le lendemain, lors des derniers tours. Chaque combat est surveillé par les entraîneurs des deux lutteurs. Les entraîneurs sont en del ; ils conseillent les lutteurs, les stimulent parfois d’une tape sur la cuisse ou sur les fesses ; ils peuvent aussi jouer le rôle d’arbitre en cas de litige. A l’issu d’un combat, le vainqueur effectue la danse de Garouda, il récupère le chapeau qu’il avait confié à son entraîneur avant le combat, puis le vaincu passe sous son bras droit en signe de respect (quoique ce soit parfois le contraire, lorsque le vaincu est plus âgé ou plus titré).

Tir à l'arc

Nous quittons le stade pour assister aux épreuves de tir à l’arc. A l’extérieur du stade règne une ambiance de kermesse. Des stands proposent boissons et collations. Durant ces deux jours fériés, le Naadam est occasion de sortie familiale ; les femmes et les petites filles se font élégantes. Scènes surréalistes : un jeune homme debout au milieu de la foule tient un téléphone relié on ne sait où et offre ses services de « cabine téléphonique », tandis qu’une vieille femme, assise par terre devant un pèse personne, propose un pesage moyennant quelques tugruts !

Le tir à l’arc attire un public moins nombreux que la lutte et la course. Cette activité fait aussi l’objet d’une couverture médiatique moins importante. Il est vrai que, si le tir fut jadis fort pratiqué pour la chasse et la guerre (les mongols étaient réputés pour leur adresse, et leurs arcs pour leur puissance de tir), aujourd’hui il ne fait plus guère partie de la vie quotidienne, ce qui n’est pas le cas du cheval (les Mongols non citadins vivent littéralement dessus) ni de la lutte (qui est très populaire et peut être pratiquée par tous, n’importe où et dès le plus jeune âge).

Le costume mongol

Nous avons là l’occasion d’observer de près les magnifiques costumes mongols. Le del est le vêtement traditionnel du pays. C’est une longue robe commune aux hommes et aux femmes. Elle se boutonne sur le côté droit, se ferme par un col haut et étroit, et elle est serrée à la taille par une large ceinture de tissu coloré. Cette ceinture permet de stocker de menus objets, et a aussi pour fonction de maintenir le dos des cavaliers. Lorsqu’il fait chaud, on peut dégager l’épaule droite du del, voire tout le torse. Les manches, longues, peuvent se rabattre sur les mains ; ainsi, elles peuvent servir à protéger du froid ou à saisir un objet brûlant. Le del est de couleur unie, souvent bleu ou gris clair, mais durant le Naadam on peut en voir de beaucoup plus somptueux, de même que les bottes et le chapeau.

« Curieusement, dans les montagnes, les gens ne portaient pas de gants, on n’en avait pas. En revanche, on avait de longues manches ; elles vous permettaient de saisir les objets tranchants, froids ou brûlants [...] Et puis, on avait aussi la pierre chaude qu’on portait dans sa poche de poitrine comme un petit poêle, comme un soleil minuscule, et qu’on pouvait prendre dans sa main gelée pour se réchauffer. [...] On la faisait chauffer le matin sous la cendre chaude. » (Ciel bleu)

Le pantalon porté sous le del est caché par le bas de la robe et par les bottes. Les bottes ont le bout recourbé, pour ne pas blesser la terre mère. Habituellement noire, elles peuvent être de couleurs vives à l’occasion du Naadam ; il en va de même des bottes portées par les lutteurs.

Le del n’est pas porté en ville, où l’on s’habille à l’occidental (toutefois, des stylistes s’en inspirent pour leurs créations). Dans la steppe, les éleveurs sont vêtus aussi bien à l’occidental qu’en del. Ils se coiffent d’un chapeau de feutre sorti tout droit de quelque western, ou plus simplement d’une casquette; beaucoup plus rarement du chapeau traditionnel, un genre de calotte de couleurs vives au sommet surélevé.

Les candidats au tir à l’arc (206 cette année) sont aussi bien des hommes que des femmes, de jeunes enfants que des vieillards. Ceux qui attendent leur tour bandent leur arc pour le tester, ils se saluent, discutent entre eux, tandis que les tireurs se concentrent et décochent leurs flèches. La cible est située à 75 mètres pour les hommes, 60 pour les femmes. Elle est constituée de cylindres de la taille d’un gobelet, empilés et alignés, et surmontée d’un fil rouge. Le but est d’atteindre ces cylindres ou de passer sous la ligne. Lorsque le tireur y parvient, les arbitres placés derrière la cible lèvent les bras et crient « Uukhaï ! » (« bravo », « bon tir »). Les hommes disposent de quarante flèches, les femmes de vingt flèches. Le vainqueur final reçoit le titre de « Mergen », c’est à dire habile tireur.

Une course de chevaux

Nous quittons le terrain de tir pour déjeuner à l’hôtel, et aussi faire une petite sieste réparatrice car la fatigue du voyage et le décalage horaire de sept heures commencent à se faire sentir. En début d’après-midi, le bus nous emmène hors de la ville pour assister au passage d’une course de chevaux.

Le Naadam comporte en tout six courses, correspondant à différents âges des chevaux. Les cavaliers sont de jeunes enfants, âgés de cinq à douze ans, garçons et filles (mais ces dernières sont minoritaires). Les distances à parcourir vont de 20 kilomètres pour les chevaux les plus jeunes à 35 pour les étalons. Symbolique tout comme les 42 kilomètres du marathon, cette distance de 35 kilomètres correspond au « urton », la distance qui séparait les relais de poste mis en place par Gengis Khan à travers son immense empire. A chaque relais de ce poney express avant l’heure, trois chevaux frais et dispos étaient à disposition des messagers de l’empereur ; ce système a subsisté pendant 700 ans.

Quelques 2000 chevaux participent à ce Naadam. Les chevaux ont été préparés plusieurs mois à l’avance : leur régime alimentaire a été surveillé pour qu’ils atteignent un poids idéal, et ils ont été entraînés à la course.

Nous nous arrêtons en rase campagne, au bord de la route, là où doivent passer les chevaux. La foule est peu nombreuse, les spectateurs préférant plutôt assister aux arrivées. C’est notre premier contact avec la steppe mongole. Je suis aussitôt saisi par l’agréable et entêtante odeur de l’armoise, cette herbe aromatique omniprésente qui embaume l’air... et imprègne durablement les semelles des chaussures.

Au loin, un nuage de poussière signale l’arrivée imminente des chevaux ; on ne peut s’empêcher d’imaginer l’effet que devait produire, jadis, les dizaines de milliers de guerriers de Gengis Khan traversant la steppe au grand galop. Le peloton de tête passe devant nous, un peu trop loin pour que l’on puisse bien les voir, suivi du gros de la troupe. Certains chevaux ont perdu leur cavalier ; aucune importance, ces chevaux seront tout de même classés, car c’est le cheval qui importe, pas le cavalier. D’ailleurs, dans les interviews télévisées, ce sont les éleveurs qui seront interrogés, et non les cavaliers (ni les chevaux...).

Kermesse mongole

Tout s’est passé très vite. Nous nous rendons alors sur le lieu de l’arrivée de la course : une vaste prairie où sont regroupées une centaine de yourtes. Ce camp fait de bric et de broc est un curieux arlequin mêlant tradition et modernité : chevaux, dels, yourtes où l’on vend de l’aïrak (le lait de jument fermenté) et des beignets de moutons, côtoient tentes de camping, voitures, vêtements européens, jeunes aux cheveux décolorés, tables de billards (jeu dont les Mongols citadins sont férus) et générateurs électriques. Ce contraste est assez caractéristique du clivage qui peut exister entre la vie citadine et la vie nomade des éleveurs ; un résumé du pays concentré sur quelques hectares...

Entre deux rangées de yourtes circulent piétons et cavaliers. De loin en loin retentit un « Tchou ! Tchou ! », le son par lequel les cavaliers ordonnent à leurs chevaux d’avancer. Assis ou allongés à l’ombre d’une tente, certains se reposent, discutent nonchalamment. Il règne la même ambiance de kermesse populaire que j’ai ressentie à la sortie du stade. C’est également dans ce campement que les Mongols feront la fête, le soir venu – et ne lésineront pas, paraît-il, sur l’alcool... Cette petite promenade fournit l’occasion d’admirer les selles mongoles. Surélevées par rapport aux selles européennes, elles sont en bois, peintes de couleurs vives, souvent décorées de cabochons d’argent (parfois, la bride est aussi ornée de petites pièces d’argent). Les étriers sont courts : en fait, le cavalier mongol se tient le plus souvent debout sur ses étriers ; lorsqu’il est assis, il se penche d’un côté puis de l’autre ; au repos, il quitte parfois la selle pour s’asseoir derrière, confortablement accoudé sur son cheval.

La crinière des chevaux qui participent au Naadam est souvent coupée en brosse, ou bien attachée pour former une houppette au sommet du crâne ; la queue aussi peut être attachée.

Le soir venu, dîner dans un hôtel : cuisine européenne (ce qui est un peu dommage, impatient que je suis de goûter à la cuisine mongole), et spectacle de danseurs, équilibristes et contorsionnistes du cirque d’Ulaan Bator.

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